Une analyse des thèmes représentés dans les images publicitaires de Cyberpunk 2077
Arrêtez-moi si vous avez déjà vécu cela.
Vous étudiez pour un examen, dans deux jours. Sur votre écran, caché derrière un PDF, un Powerpoint et un document Word, il y a un stream YouTube d’ouvert, qui envoie à tes écouteurs une musique relaxante, des rythmes synthétiques légers entrecoupées de grésillements, de pops et de quelques paroles disparates.
Sur l’écran, caché derrière, il y a une fille, assise à son bureau, qui, un peu comme toi, s’affaire à étudier, en boucle. Parfois, elle jette un regard vers l’extérieur et semble se perdre un instant dans l’horizon. Puis, elle se retourne vers ses feuilles, accotée sur une main.
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Il y a, depuis quelques années, une explosion de la musique "nostalgique" pour les années 1980 et 1990 sur YouTube. Je pense entre autres à des genres musicaux influents comme le vaporwave, le synthwave, le chillwave, le City Pop et le maintenant iconique lofi hip-hop. Ce sont des genres qui utilisent des synthétiseurs, des rythmes dépassés et qui intègrent des paroles de produits banals d'époques passées. On trouve des sons tirés de publicités, de discours de politiciens décédés et des extraits de série télévisuelles.
Dans son article « Reconstruced Nostalgia », Paul Ballam-Cross apporte le terme du nostalgia genre continuum, le continuum du genre nostalgique. C’est un terme qu’il utilise pour parler du Chillwave, du Synthwave, du Vaporwave et de leurs dérivés. C’est un concept que j’aime bien, puisque, fondamentalement, le continuum nostalgique sur YouTube prend plusieurs formes. Le continuum nostalgique prolifère sur YouTube sous la forme de radios en ligne ou de longues vidéos musicales de 40 à 100 minutes. Les images qu'utilisent ces vidéos sont bourrées de symboles dépassés, des télévisions cathodiques, des cassettes, des VHS, des couleurs criardes typique des années 1980 et 1990. Il y a visiblement un sentiment mélancolique qui est évoqué ici, un souvenir d'un passé nébuleux où les choses semblaient mieux.
Le vaporwave est probablement le premier genre musical créé sur l’internet et le premier exemple historique du continuum nostalgique. L’exemple iconique du mouvement est Floral Shoppe de Macintosh Plus, un album de musique électronique qui échantillonne des voix distantes, des sons de synthétiseur et même des musiques d’ascenseur pour imaginer une musique rétro et onirique. La couverture de l’album elle-même est un mélange hétéroclite de symboles. Il y a un plancher mosaïque rose et noir, un buste ancien d’Helios et une photo de l’horizon New-Yorkais pré-11 septembre. Le titre est présenté la fois en anglais et en japonais. Le tout a comme objectif de créer un sentiment de nostalgie pour un passé qui n’a jamais réellement existé (Cramer Bornemann, 2017).
Un genre particulièrement fascinant qui semble s’être développé en parallèle est le « Sovietwave. » Originaire des républiques de l’ex-Union Soviétique, le sovietwave est un style de synthpop, entrecoupé de sons typiques des années 80 dans le deuxième monde. On entend, entre les beeps et les boops, des échantillons tirés de dessins-animés russes ou des discours de politiciens soviétiques. On illustre ces morceaux musicaux de propagande soviétique ou d’illustrations qui présentent le rêve de la course à l’espace. Dans la musique, les synthétiseurs mettent de l’avant des mélodies rétrofuturistes : on invente la musique du futur, selon les années 80 et 90 (Cheung, 2019). Même sans avoir vécu en Union Soviétique, les morceaux génèrent un sentiment de nostalgie pour ce rêve perdu.
Impossible ici de ne pas mentionner au passage l’apparition du « City Pop » dans l’imaginaire populaire occidental. C’est une vidéo maintenant iconique de la chanson de Mariya Takeuchi « Plastic Love » (1984) qui est responsable de l’explosion en popularité récente du genre sur YouTube et en Occident. La chanson « Mayonaka no Door / Stay With Me » a aussi fait partie d’un trend viralsur Tiktok en octobre dernier. Des jeunes faisaient écouter la chanson à leurs mères. La chanson faisait grandement réagir celles qui s’en souvenaient. (Zhang, 2021).
Le City Pop, fondamentalement, c’est de la musique pop japonaise des années 1970 et 1980. C’est un mélange exubérant de jazz, de rock, de disco, de funk américain, typique de cette époque, mais adapté au monde Japonais (Zhang, 2021).
« lofi hip hop radio - beats to relax/study to » est une diffusion continue en direct d’une playlist de lofi hip hop. C’est l’exemple le plus iconique de ce genre musical, particulièrement apprécié des étudiants et les jeunes adultes. Le lofi hip-hop est souvent utilisé comme son de fond lors de de séances d’étude, à cause de ses rythmes relaxants et tamisés.
Dans leur article sur le sujet, Emma Winston et Laurence Saywood argumentent que le style est un dérivé du hip-hop traditionnel avec un son typiquement « low-fidelity ». « Low Fidelity »au sens que les créateurs s’efforcent d’émuler les technologies du passé, à créer un son malmené. On ajoute des grésillements, des pops, des extraits vocaux de différentes sources (Winston et Saywood, 2019 : 44), à la manière du vaporwave.
Ces derniers exemples, en soi, semblent déconnectés, mais font partie de ce que plusieurs ont identifié comme un engouement pour la musique sur YouTube qui aborde la nostalgie, la mélancolie et les rêves du passé (Cheung, 2019). Si nous explorons les commentaires sous ces vidéos, ceux abordant la nostalgie sont nombreux.
Évidemment, les commentaires ne portent pas tous sur ce sentiment, mais on remarque des exemples sous tous les vidéos étudiés. Peu importe si ces genres évoquent l’idéal d’une société capitaliste prometteuse, la promesse d’un futur brillant ou simplement la nostalgie pour un passé inexistant, on aperçoit un engouement pour ce sentiment. Les auditeurs parlent de nostalgie et sont mélancoliques. Ils se tournent vers un moment, imaginaire, où les choses semblaient mieux, ou les idées qu’évoquent ces genres musicaux semblaient réalistes.
Dans son article pour le Journal of Popular Music Studies, Paul Ballam-Cross parle de « nostalgie reconstruite ». Les créateurs et créatrices mélangent les différents styles musicaux, les références d’époque et les instruments. L’esthétique des genres qu’il étudie est ancré dans la technologie analogue : une fétichisation des cassettes, des VHS, des tournes disques. (Ballam-Cross, 2021 : 73-74) et des artefacts de la période : les centres commerciaux, le surréalisme, l’été et la mer et les textes orientaux (l’écriture japonaise sur Floral Shoppe, par exemple.) (Ballam-Cross, 2021 : 80). La nostalgie reconstruite est l’idée que le nostalgia genre continuum utilise l’imagerie des années 1980 et 1990, mais forment ensemble une idée d’une époque qui n’a jamais réellement existé, créant donc quelque chose qui est à la fois nostalgique et nouveau (Ballam-Cross, 2021 : 72).
En parlant de lo-fi hip-hop, Winston et Saywood soulignent particulièrement l’intégration d’un échantillon audio de la série Legend of Korra (2012-2014). Une inclusion qui brise le lien temporel avec les années 1980 et 1990, mais, qui pourtant, ne casse pas le potentiel nostalgique du morceau. Les auditeurs entrent dans le jeu. Un commentaire qu’elles ont relevé dit : « I’ve never seen Korra, but remember it from when I was a kid, » (Dreamwave, 2017, cité dans Winston et Saywood, 2019 : 46). La combinaison de la musique « analogique » des rythmes modernes et des échantillons, mènent les auditeurs à s’inventer un « souvenir » de leur enfance. (Winston et Saywood, 2019 : 47).
La fascination dans l’Ouest avec le City Pop rappelle aussi cette nostalgie pour un passé imaginé. Ce sont des chansons qui rappellent les années 1970 et 1980 mais… incorrectement. La musique sonne comme du funk, comme du jazz, comme du soul, mais il y a quelque chose qui cloche. La chanteuse est Japonaise, les rythmes sont juste assez différents pour être étranges. C’est une musique qui nous « rappelle » un souvenir impossible du passé. Comme le commentateur sous Plastic Love l’a si bien dit, « Anyone else remember that time you weren’t in Tokyo in the 80s? Yeah, me too. »
Cet engouement actuel pour le continuum nostalgique, pour une musique qui imagine une ère plus détendue, plus simple, n’est peut-être pas si aléatoire que ça.
Mes générations (les milléniaux et la génération Z) sont parmi les plus stressées, anxieuses et déprimées de l’histoire. Les milléniaux ont dû surmonter la récession de 2008, un événement « qui n’arrive qu’une fois dans une vie, » …qui s’est ensuite reproduit avec la récession causée par la pandémie de la Covid-19 en 2020-2021. Mes générations ont eu à prendre des emplois difficiles, sans prospects d’avenirs. Leurs salaires ont stagné et leurs conditions de travail ont empirées, et ce, bien que ce sont probablement les générations les plus éduquées… ever. (McMaster, 2021 :
Les gens de mon âge ont aussi eu ont eu à repousser les jalons de la vie adulte :
« "They're not homeowners, they're not in relationships, they're not getting married. They're living in the basement of their parents' home. There's all kinds of things that have frustrated their efforts to get ahead.
The generation as a whole is among the most educated it has ever been, but the path to success is also less clear." »
Geoff McMaster, Université de l’Alberta.
Il est généralement assumé que la prochaine génération aura des meilleures conditions que celle d’avant. Tout porte à croire que c’est une règle qui ne s’appliquera pas à nous. Je ne mentionne ici que les réalités matérielles de mes générations, mais… le réchauffement climatique est une réalité qui met au défi cette idée que les choses s’amélioreront pour nous dans le futur
Le lofi les nombreux genres du continuum nostalgique rassurent et réconfortent. En étant subtilement nostalgique pour un passé mystérieux et disjoncté, la trame sonore de la fille lofi est devenue iconique pour une partie particulièrement « en ligne » de mes générations.
Je me souviens du rêve d’explorer les étoiles de la course à l’espace, du bonheur de magasiner au centre commercial avec mes amis, de mes soirées froides passées à explorer Tokyo. C’était bien, les années 1990.
Sur l’écran, il y a une fille, assise à son bureau, qui, un peu comme moi, s’affaire à étudier, en boucle. Parfois, elle jette un regard vers l’extérieur et semble se perdre un instant dans l’horizon. Puis, je me retourne vers mes feuilles, accotée sur une main.
Ballam-Cross, P. (2021). Reconstructed Nostalgia: Aesthetic Commonalities and Self-Soothing in Chillwave, Synthwave, and Vaporwave. Journal of Popular Music Studies, 33(1), 70‑93. https://doi.org/10.1525 /jpms.2021.33.1.70
Bornemann, T. C. (2017, 8 décembre). Vaporwave, Revisited: A Second Look at the Forever-Mutating Genre. Medium. https://medium.com/@Thorcb/ vaporwave-revisited-a-second-look-at-the- forever-mutating-genre-b7da26d76ca3
Cheung, N. (2019, 11 novembre). Nostalgia for the future: what Sovietwave has taught me. PHASER. https://phasermagazine.com/ main/2019/11/11/nostalgia- for-the-future-what-sovietwave-has- taught-me
Mcmaster, G. (2020, 28 janvier). Millennials and Gen Z are more anxious than previous generations: here’s why. University of Alberta. https://www.ualberta.ca/folio/ 2020/01/millennials-and-gen-z-are- more-anxious-than-previous-generations- heres-why.html
Winston, E. et Saywood, L. (2019). Beats to Relax/Study To: Contradiction and Paradox in Lofi Hip Hop. IASPM Journal, 9(2), 40‑54.
Zhang, C. (2021, 24 février). The Endless Life Cycle of Japanese City Pop. Pitchfork. https://pitchfork.com/features/ article/the-endless-life-cycle-of-japanese- city-pop/
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Tu as une chaise, il y a un méchant devant toi. Comment est-ce que la chaise va casser?
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